A friend to all is a friend to none.

Ce jour-là, Olympe était sortie de cours plus tôt que les autres. Elle ne s’était pas sentie bien, et a soudain levé la main pour demander la permission au professeur donnant le cours de se rendre à l’infirmerie de l’académie. Après avoir assuré qu’elle n’avait pas besoin d’être accompagnée et avoir obtenu le feu vert de l’enseignant, elle rangea silencieusement ses affaires, se leva toujours sans un bruit, jeta un dernier coup d’œil à sa partenaire dans cette classe, Alice Lacroix, en lui montrant qu’elle était désolée, et se dirigea vers la sortie à pas de loup. Loup… Cette bestiole qui lui valait ce bandage tout autour du corps, en partant du haut du torse, jusqu’au nombril. Cette attaque n’avait pas réellement été éprouvante en elle-même, mais la blessure ne faisait que raviver les souvenirs douloureux de cette rencontre maudite. Pourquoi cette créature s’était-elle attaquée à elle ? La seule chose qu’elle faisait à cette heure-ci, c’était son boulot de préfète. Ce soir-là, elle avait été assignée, avec un autre préfet, à faire les rondes du parc de l’école française. Ils s’étaient séparés au même endroit que d’habitude, et c’est seulement quelques minutes après cela qu’elle entendit un grognement venant des buissons se trouvant à sa droite. Méfiante, elle s’approcha sans aucun son, mais était loin de s’attendre à voir ces deux pupilles rouge qu’elle pouvait distinguer sans difficulté. Mais celles-ci n’étaient visiblement pas en train de l’observer, non, elles semblaient regarder la lune, accrochée au ciel sans nuages, parsemé d’étoiles luisantes. C’est alors qu’Olympe comprit en moins d’une seconde de quelle créature il s’agissait, et ce ne fut que trop lentement qu’elle commença à entamer une course folle en direction de l’académie. Tout ce qu’elle voulait, c’était rentrer dans l’enceinte fermée, et oublier ce qu’elle avait vu. Malheureusement, c’était sans compter sur la rapidité de ce loup-garou, qui, lorsqu’il entreprit de sauter sur la blondinette, émit un grognement énorme, qui la fit faire volte-face, et résulta en une griffure sur toute la longueur du torse de la jeune fille. Sa belle peau claire était maintenant recouverte par une fine couche de son propre sang qu’elle perdait abondamment. Mais la chose la plus étrange se produit alors. Ce loup, qui était évidemment une personne, la regarda droit dans les yeux, et la jeune française fut persuadée de lire dans son regard du regret, comme s’il était désolé. Il… Ou elle… En moins d’une seconde, la créature repartit d’où elle venait. C’est bien rapidement que l’autre préfet, chargé lui aussi de la ronde dans le parc, arriva en courant, alerté par le grognement bestial de l’animal, suivis des cris de la française. Il la transporta dans ses bras jusqu’à l’infirmerie, réveillant l’infirmière, qui la prit en charge pour les deux nuits succédant son attaque.

Elle dut raconter des mensonges sur ce qu’il s’était passé. Le dernier regard que cette créature lui avait lancé lui avait fait pitié, et elle avait décidé de ne pas révéler la vérité sur l’animal qui l’avait attaqué. Aussi, elle inventa un Botruc surgissant d’un buisson qui l’a attaqué. Suffisamment crédible, cette histoire n’eut aucune suite. Mais aujourd’hui, toujours marquée physiquement et mentalement par cette attaque, ce lourd secret qu’elle n’a alors confié à personne lui pèse. Deux semaines ont passé, et elle n’y pense pas moins. Après sa visite à l’infirmerie, où on lui changea son bandage, elle décida de ne pas se rendre en cours pour les dix dernières minutes, mais alla s’installer sous un arbre dans les jardins. Sa prochaine période était libre, elle n’avait pas cours, et elle n’avait, de toute façon, plus la tête à étudier. Elle regardait les gens passer, les autres élèves rigoler, le soleil chantant la joie qu’elle ne ressentait plus. Elle était tant intriguée par n’importe quel élève ou professeur, ou même membre du personnel, qui pouvait avoir été cette créature, qu’elle ignorait n’importe quelle discussion qu’elle entendait, question qui lui était adressée ou autre futilité à laquelle elle aurait pu participer. Elle ne pensait plus à qu’à lui… Ou elle. Cette personne, elle allait la retrouver, et l’aider, ou simplement lui parler. Cet individu était en mal, sa nature le faisait souffrir, elle le savait. Elle le sentait au fond d’elle-même. Qui pourrait être heureux d’être un tel monstre ? Qui pourrait se aimer être sous l’emprise de la lune lorsqu’elle est pleine ? Qui ?

Fiche (c) Espe